Finances publiques : la Cour des comptes dresse un constat sévère et demande une maîtrise encore accrue des dépenses publiques

7 février 2019

Le rapport public annuel de la Cour des comptes a été rendu public mercredi 6 février. Il pointe un « scénario de finances publiques préoccupant » et « affecté de multiples fragilités » pour 2019 et au-delà.

Selon la dernière prévision du Gouvernement, le déficit public, après huit années de baisse ininterrompue,  s’établirait à 2,7 points de PIB en 2018, soit le même niveau qu’en 2017. Pour la Cour des comptes, les éléments disponibles au 22 janvier 2019 laissent penser que cette prévision devrait être atteinte.

Le déficit structurel (déficit hors impacts des facteurs exceptionnels et de la conjoncture) serait, quant à lui, de 2,3 points de PIB. Il ne se réduirait pas par rapport à 2017. Si l’évolution des dépenses contribuait à la réduction du déficit structurel à hauteur de 0,2 point de PIB, les mesures de baisse des prélèvements obligatoires, selon la Cour des comptes, accroîtraient le déficit d’un montant équivalent. Ainsi, la France resterait très éloignée de son objectif de moyen terme (OMT) d’« équilibre structurel  », correspondant à un déficit structurel inférieur à 0,4 point de PIB, seuil fixé par la loi de programmation des finances publiques de décembre 2014 comme par celle de janvier 2018.

La dette publique rapportée au PIB a encore augmenté : elle atteindrait 98,7 points de PIB en 2018. Pour la Cour, cette trajectoire est préoccupante au regard de celles de l’Allemagne et de la zone euro, dont la dette diminue respectivement depuis 2012 et 2015. La dette publique allemande rapportée au PIB devrait même être revenue au seuil de 60 points de PIB en 2018, précise-t-elle.

Le projet de loi de finances (PLF) pour 2019, présenté en septembre 2018, prévoyait un déficit public de 2,8 points de PIB, en augmentation de 0,2 point en raison notamment de la transformation du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi en baisse de cotisations, qui accroît le déficit de manière temporaire et exceptionnelle. La Cour considère que cette prévision était affectée de quelques facteurs d’incertitude : l’impact de la mise en œuvre du prélèvement à la source sur le rendement de l’impôt sur le revenu (qui pourrait affecter de 2 Md€ à la hausse ou à la baisse le solde public) ; la croissance de l’investissement des administrations publiques locales pourrait être plus élevée que prévu par le Gouvernement ; les mesures de soutien au pouvoir d’achat des ménages, prises en toute fin d’année 2018, ont conduit à dégrader de 0,4 point de PIB la prévision de déficit public, du Gouvernement, désormais de 3,2  points de PIB en 2019, et de manière équivalente, celle de déficit structurel, qui serait désormais au mieux stable.

Cela étant dit, l’APVF tient à indiquer que la reprise de l’investissement est indispensable pour le développement économique local. L’investissement est un facteur de croissance et de création de richesse.

La Cour poursuit. Seule une partie des mesures en faveur du pouvoir d’achat des ménages a été intégrée à la loi de finances pour 2019. Par conséquent, la prévision de déficit public de la loi de finances initiale (LFI) ne tient pas compte des mesures qui ont été votées immédiatement après, dans la loi portant mesures d’urgence économiques et sociales, alors que ces mesures accroissent le déficit de 3,7 Md€. Les magistrats financiers demandent alors à l’Etat de nouvelles économies et des recettes supplémentaires pour que la trajectoire prévisionnelle soit respectée.

Le scénario macroéconomique de la LFI, qui reste celui présenté en septembre 2018 lors du dépôt du PLF, ne tient compte ni de l’impact macroéconomique des mesures prises en fin d’année, ni, en sens inverse, de la dégradation de la conjoncture survenue depuis lors en Europe. Au total, si la prévision de croissance française sur laquelle repose la LFI, à savoir 1,7 %, n’est pas hors de portée, elle présente un risque sérieux de ne pas être atteinte. Dans ces conditions, la Cour estime indispensable que le Gouvernement présente, dès que possible, des projets de lois financières rectificatives, pour l’État et la sécurité sociale, intégrant de manière exhaustive et sincère l’ensemble des mesures annoncées ainsi que les conséquences de l’évolution de la situation macroéconomique. Au-delà, la Cour appelle une actualisation de la trajectoire de finances publiques présentée dans la loi de programmation de janvier 2018.

Les perspectives de finances publiques pour 2019 témoignent de la fragilité du redressement opéré à ce jour : pour la Cour, les mesures d’urgence visant à répondre à la crise sociale ont eu pour effet de porter la prévision de déficit public au-dessus du seuil de 3 points de PIB.

Le rapport achève son analyse en expliquant que la faiblesse de l’assainissement des finances publiques est la cause de la réduction des marges budgétaires de la France. Pour les retrouver, « une réduction soutenue des déficits effectif et structurel est donc impérative ». Or, « compte tenu du niveau élevé des prélèvements obligatoires, un tel assainissement, a fortiori si on veut l’accompagner d’une baisse de prélèvements obligatoires, passe nécessairement par une maîtrise accrue des dépenses publiques ».

L’APVF est inquiète : eu égard aux efforts importants fournis par les collectivités territoriales depuis maintenant une dizaine d’années – et surtout, leurs effets préoccupants sur la qualité des services publics de proximité et le développement économique – l’APVF s’interroge sur l’impact que pourraient avoir les recommandations de la Cour des comptes sur les finances locales. L’APVF considère que s’il existait des marges de réduction encore plus soutenue des dépenses, ce n’est plus dans le secteur local. Les collectivités ont pris largement leur part au redressement de la situation financière de la France.

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