Finances locales : l’APVF auditionnée par la Cour des comptes

29 avril 2021

L’APVF a été auditionnée par la Cour des comptes dans le cadre de l’élaboration du rapport annuel sur les finances locales. Une occasion de mettre en lumière la situation financière particulière des petites villes. 

I. UNE DEGRADATION DES FINANCES PUBLIQUES MOINDRE QU’ANTICIPEE 

  • Une dégradation inédite des finances publiques, moins prononcée pour les collectivités locales :

Si globalement, l’APVF partage le même constat que la Cour des comptes, les résultats de notre enquête annuelle sur la situation financière des petites villes appelle à nuancer ce constat :

    • Stabilité des recettes fiscales, mais pertes très inquiétantes de recettes tarifaires, non compensées par l’Etat ;
    • Des économies en dépenses pour une grande majorité de petites villes, mais qui, pour un tiers des petites villes, n’ont pas suffi à équilibrer les budgets en fonctionnement.
  • Des dispositifs exceptionnels de soutien de l’État aux collectivités moins mobilisés qu’anticipé :
    • Dispositifs d’étalement de charges et transfert des excédents d’investissement en fonctionnement :

En grande majorité, les petites villes ne prévoyaient pas, en novembre 2020, d’utiliser la possibilité de transférer une partie de leurs excédents de la section d’investissement en section de fonctionnement pour couvrir ces dépenses, ni d’étaler leurs charges exceptionnelles sur plusieurs exercices.

Notre enquête annuelle sur la situation financière des petites villes, publiée le 21 avril 2021, le confirme : elles ne sont que 6 % à avoir mobilisé le dispositif d’étalement de charges en 2020.

En revanche, alors que peu de collectivités souhaitaient transférer une partie de leur excédent d’investissement en fonctionnement en 2020, elles sont nombreuses à nous avoir interrogé sur la prolongation du dispositif en 2021, témoignant de leur intérêt.

    • DSIL exceptionnelle :

Alors que l’APVF craignait que les petites villes ne soient les grandes oubliées du dispositif, elle a constaté que sur les 574 millions d’euros d’autorisation d’engagement en 2020, 31 % ont été fléchés sur les petites villes.

Mais l’APVF regrette, comme la Cour, que très peu de crédits de paiement n’aient été effectivement alloués.

Surtout, il y a une vraie inégalité de traitement sur le territoire. Certaines petites villes disposent de toutes les informations nécessaires au montage de leurs projets, ont les éléments de la part des préfectures tandis que d’autres n’ont aucune visibilité et se sentent dépassées.

    • Filet de sécurité :

8 % des petites villes ayant répondu à notre enquête ont perçu leur acompte. Au total, 13 % environ des petites villes sont éligibles au filet de sécurité, principalement des petites villes touristiques.

II. DES PERTES DE RECETTES ATTENUEES PAR LA STABILITE DES PRODUITS FISCAUX

  • Une stabilisation des recettes fiscales à périmètre constant, mais une baisse sensible des recettes tarifaires et domaniales :

Par nature, les recettes fiscales des petites villes ont été moins impactées que d’autres collectivités locales (même si 13 % environ des petites villes sont éligibles au filet de sécurité).

Mais, contrairement à ce qu’indique la Cour des comptes, les recettes de fonctionnement, dans leur ensemble, ont baissé pour 60 % des petites villes. A l’inverse, 13 % les ont vues augmenter et 28 % stabiliser.

Concernant précisément les pertes de recettes tarifaires, elles ont diminué de 34 % en moyenne dans les petites villes : baisse des produits des services (restauration scolaire et périscolaire de -40 %), des redevances d’occupation du domaine public…

  • Des transferts financiers de l’État de nouveau en progression en 2020 :

Des transferts financiers en progression, mais à enveloppe globale. Lorsque l’on regarde au niveau de chaque collectivité, elles sont nombreuses à subir encore les baisses de dotations. En 2021, la DGF baisse pour un tiers des petites villes.

III. DES CHARGES DE FONCTIONNEMENT EN LEGERE HAUSSE A PERIMETRE CONSTANT 

  • Une diminution apparente des charges de fonctionnement liée à des effets de périmètre :

En 2020, les charges de fonctionnement ont diminué pour 56 % des petites villes. A l’inverse, elles ont augmenté pour un tiers d’entre-elles : hausse des dépenses d’hygiène et de sécurité sanitaire, CCAS, hausse des dépenses de personnes (personnel extérieur, rémunération des non titulaires pour des prestations de renfort dans les écoles et les services périscolaires…).

Les économies réalisées (principalement sur les charges courantes) n’ont pas toujours permis d’équilibrer les budgets. Il en va pour un tiers des petites villes.

A noter que les surcoûts liés à la crise sanitaire et économique se poursuivent en 2021 pour 77 % des petites villes.

  • La suspension du dispositif de contractualisation :

L’APVF était favorable à la suspension du dispositif de contractualisation qui n’est pas adapté à un contexte de crise sanitaire et économique.

L’APVF s’oppose à toute extension du dispositif à l’ensemble des collectivités territoriales qui n’est pas compatible avec l’ambition d’un nouvel acte de décentralisation.

IV. UNE SITUATION D’ENSEMBLE PROCHE DE 2018 MAIS UNE HETEROGENEITE DES SITUATIONS 

  • Une diversité de situations et de risques qui implique des mesures de soutien spécifiques 
    • Nous partageons le constat de la Cour là encore : si les deux tiers des petites villes estiment que leur situation financière est plutôt « satisfaisante » à l’issue des deux vagues épidémiques, elles sont 44 % à avoir absorbé le choc difficilement ou très difficilement ;
    • 35 % des petites villes voient leur capacité d’autofinancement baisser.
  • Le bloc communal : une incidence de la crise sanitaire modérée mais très hétérogène

On a tendance à considérer que les grandes villes ont été les plus impactées par la crise. Mais, il convient de souligner que certaines catégories de petites villes sont particulièrement touchées, et notamment :

    • Les petites villes touristiques: pertes de recettes fiscales, et particulièrement de la taxe de séjour (-50% pour le bloc communal) ;  
    • Les petites villes ultramarines dont le panier de recettes est étroitement lié à l’activité économique et touristique.  

V. PERSPECTIVES 2021

  • Contrairement à 2020, les dépenses de fonctionnement repartent à la hausse pour une majorité de petites villes :

Les dépenses de fonctionnement augmentent pour 52 % des petites villes.

Sans surprise, les surcoûts liés à la crise sanitaire se poursuivent en 2021 pour les deux tiers des petites villes (77%).

  • Des recettes de fonctionnement stabilisées globalement :

Les recettes de fonctionnement sont stables pour 48 % des petites villes. Avec une dotation globale de fonctionnement stable pour 53 % des petites villes et des bases d’impositions stables pour 51 % d’entre elles.

A noter malgré tout que ces recettes baissent quand même pour 35 % des petites villes.

La mise en œuvre de la réforme de la taxe d’habitation en 2021 ne pose pas de difficultés particulières à 53 % des petites villes. Difficultés rencontrées par les 47 % restantes : manque de visibilité sur l’évolution des bases et sur le montant de la compensation.

VI. TERRITORIALISATION DU PLAN DE RELANCE

  • Les élus des petites villes sont plutôt optimistes quant à la reprise de l’investissement sur leur territoire :

En effet, les dépenses d’investissement (hors remb. dette) seraient en hausse pour 63 % des petites villes.

Et pour cause, les enveloppes DSIL et DETR ont été stabilisées et la DSIL abondée exceptionnellement de 1 milliard d’euros pour soutenir la relance.

  • Reste que la reprise de l’investissement reste largement conditionnée par la répartition équilibrée des crédits de relance sur le territoire :

Or, les petites villes semblent relativement démunies face au plan de relance :

    • 39 % des petites villes estiment que les mesures du plan de relance sont insuffisantes pour accompagner la relance dans les territoires ;
    • Les modalités de territorialisation du plan de relance manquent de clarté pour 53 % des petites villes ;
    • La méthode contractuelle des CRTE manque de pertinence pour 32 % des petites villes ;
    • Dans le cadre de l’élaboration des périmètres des CRTE, plus de 50 % des petites villes estiment que la concertation avec l’Etat et les préfectures a été insuffisante ou inexistante.