L’APVF présente sa Résolution à l’issue des XXIIIe Assises des Petites Villes

10 septembre 2021

Réunis à Cenon, en Gironde, les 9 et 10 septembre 2021, pour les XXIIIe Assises de l’APVF, et après dix-huit mois de crise sanitaire au cours desquels ils se ont retrouvés en première ligne, et à six mois des grandes échéances électorales, les maires des petites villes ont souligné avec force la place et le rôle incontournables des petites villes sur l’échiquier territorial et leur volonté que ces-dernières ne soient pas oubliées dans le plan de relance du Gouvernement et dans les textes relatifs à une nouvelle étape de la décentralisation et ceux relatifs à une nouvelle politique de développement territorial.

Après dix-huit mois de crise sanitaire, marquée par ses couvre-feux et ses confinements, les métropoles feraient l’objet d’un désamour. L’heure des collectivités à taille humaine serait donc arrivée. Un indéniable regain d’intérêt et d’attractivité est d’ores-et-déjà visible dans nombre de petites villes. Nous assistons ainsi à une nouvelle forme d’urbanisation et aux limites de ce qu’il est convenu d’appeler la métropolisation. Les nouveaux habitants des petites villes continuent à avoir des besoins importants en matière d’équipements, d’accès aux services publics et d’accès à une vie culturelle diversifiée.

Par conséquent, la pérennité de cette dynamique repose sur un effort d’investissement soutenu et équitable de tous les niveaux de collectivités, mais également de l’Etat et de l’Union Européenne.

Les petites villes, avec leurs 26 millions d’habitants, ont en effet un rôle irremplaçable permettant l’équilibre entre les métropoles et le monde rural. Le plan de relance doit par conséquent être mis au service du rééquilibrage territorial.

Ce rééquilibrage ne pourra se faire qu’en prenant en compte les grands défis de demain que sont la transition écologique et numérique, sans oublier le vieillissement de la population. Les petites villes ont par conséquent vocation à être actrices de la résilience des territoires.

Enfin, à l’heure où sévit la défiance et la crise démocratique, comme l’ont démontré encore récemment les dernière élections départementales et régionales, il paraît indispensable d’élaborer un nouveau contrat de confiance entre l’Etat et les collectivités, en donnant de nouveaux pouvoirs aux territoires et à leurs élus. A ce titre, comme ils l’ont pleinement démontré pendant la crise sanitaire, les maires des petites villes sont prêts à prendre toutes leurs responsabilités.

Dans cette optique, à l’issue de leurs XXIIIe Assises, les élus de l’APVF demandent :

  • Un plan de relance qui assure une reprise par et pour les territoires ;
  • Une politique de résilience qui fasse du Bloc local un des acteurs incontournables des transformations et des transitions de demain ;
  • De nouvelles responsabilités locales qui fassent des élus locaux des décideurs pleinement légitimes.

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  1. Le plan de relance doit assurer une reprise économique par et pour les territoires

La crise sanitaire a sévèrement affecté le tissu économique des petites villes, avec parfois la mise à l’arrêt de pans entiers d’activités qui participent à la vie et à l’attractivité des communes. L’urgence était à l’accompagnement des entreprises et des commerces. A ce titre, les maires des petites villes regrettent fortement que la loi NOTR(e) les ait empêchés d’accorder des aides directes au commerce local, aux artisans, si ce n’est en accordant des aides sociales. La rigidité des lois sur les compétences s’est heurtée, en période de crise, au principe de réalité.

Tout doit cependant être fait pour assurer la reprise économique et un développement équilibré des territoires. Le plan de relance du gouvernement et celui de l’UE doit constituer une opportunité pour accroître l’attractivité des petites villes. Mais en tout état de cause, la reprise ne pourra être réussie qu’à la condition de sécuriser les finances locales.

  • Une priorité : rééquilibrer le développement économique des territoires

Les profondes disparités de développement territorial n’ont rien d’une fatalité : une politique active de leur résorption peut être menée, comme le démontrent les exemples venus d’Allemagne et d’Italie. Les petites villes peuvent et doivent à cet effet bénéficier de deux dynamiques propres : l’essor de l’économie résidentielle et un effort de réimplantation des unités de production avec une prise en compte des enjeux écologiques. Cela pose la question de l’attractivité et de la relocalisation des activités dans les petites villes.

A ce titre, les petites villes disposent d’atouts indéniables : 70% des emplois industriels se situent dans des villes de moins de 20 000 habitants. Elles sont donc incontournables pour la relocalisation de la production. Pour relever ce défi, l’APVF considère comme nécessaire :

  • De mieux accompagner les PME/ETI et de mieux les associer à la stratégie de développement des territoires ;
  • D’accroître les compétences en matière de gestion du foncier et de levier fiscal pour aider aux implantations ;
  • D’adapter la carte des formations afin de la faire coïncider avec la carte de la production.

Tous ces éléments doivent être conjugués à un soutien global à l’attractivité des petites villes, qui passe par des moyens alloués aux infrastructures et à la présence de services publics notamment dans le domaine de la santé. Le rôle de la culture ne doit par ailleurs pas être négligé comme élément clef de l’attractivité des territoires.

Outre un soutien attendu de l’Etat, les petites villes doivent tirer parti du plan de relance européen notamment dans le domaine de la transition écologique et numérique.

S’agissant du numérique, l’APVF redit la nécessité de s’atteler encore plus rapidement à la résorption de la fracture numérique. L’ensemble des territoires doivent pouvoir bénéficier du très haut débit et de la fibre. Les mesures d’inclusion numérique avancées dans le plan de relance vont ainsi dans le bon sens.

Les mesures prises dans le cadre du plan de relance pour accompagner la reprise économique des territoires sont importantes et intéressantes, notamment avec la DSIL exceptionnelle et la mise en place des CRTE. Mais bien souvent, elles atteignent leur limite dans les petites villes du fait de leur faculté limitée à capter des crédits par manque d’ingénierie ou du fait de dysfonctionnement des dispositifs et l’insuffisante association et implication des maires qui entraînent des retards aux démarrages de projets.

Dans cette optique, l’APVF demande :

  • Une réforme des dispositifs de soutien à l’investissement local pour une répartition plus équilibrée et transparente des crédits ;
  • Une meilleure association des Maires à l’élaboration des CRTE ;
  • Un suivi systématique de l’emploi des crédits pour s’assurer de leur équitable répartition sur l’ensemble des territoires.

 

  • Une méthode : l’exemple du programme Petites Villes de demain

L’APVF salue la mise en place du Programme Petites Villes de Demain qu’elle réclamait avec insistance depuis des années. Il s’agit d’un plan transversal et spécifique à chaque territoire. Cette spécificité doit être respectée.

Dans cette optique, l’APVF demande plus de souplesse dans la part de l’Etat et notamment des Préfets, dans le copilotage du programme et une prise en compte plus grande de la spécificité des petites villes caractérisées par de lourdes charges de centralité, des problématiques fortes de paupérisation des centres anciens et de vacances commerciales.

L’heure est maintenant à l’action opérationnelle. Pour ce faire, l’APVF préconise un approfondissement du programme qui passe par un soutien à l’investissement plus ambitieux et la mise en place d’une fiscalité au service de la revitalisation des cœurs de ville. Cet approfondissement ne doit cependant pas servir de prétexte à la mise en place de nouveaux appels à projet complexes et chronophages.

  • Une nécessité : sécuriser les finances locales pour réussir le plan de relance 

La crise sanitaire a affecté les finances locales des petites villes. A un degré moindre que d’autres collectivités, elles ont cependant été impactées par les dépenses induites (achats de masques, personnels mis à disposition dans les écoles et les centres de vaccination…) et par la baisse de leurs recettes tarifaires. De ce fait, l’investissement local a durement chuté en 2020. Les mesures prises pour mutualiser l’impact de la crise à la demande notamment de l’APVF (filet de sécurité, compensation de la baisse des recettes tarifaires…), sont appréciables mais risquent de ne pas être suffisantes.

L’APVF demande donc dans la perspective du PLFR 2022 un renforcement de la péréquation financière pour corriger les inégalités territoriales. Elle continue de s’inquiéter des conséquences à moyen terme, encore non maîtrisées, de la suppression de la taxe d’habitation, qui n’est rien d’autre que la poursuite depuis 20 ans des atteintes successives portées à l’autonomie financière des collectivités territoriales.

Enfin, considérant que les collectivités territoriales ont un rôle majeur à jouer dans la réussite du plan de relance, il n’est pas complètement illégitime de leur assurer un retour véritable sur investissement. A ce titre, une partie des dotations d’investissement devraient être libres d’emploi, tandis qu’une augmentation de la DGF dès 2022 faciliterait grandement et très clairement les engagements d’investissement des collectivités territoriales.

En tout état de cause, l’APVF manifesterait, si tel était le cas, après les grandes échéances électorales, sa très forte opposition à toute nouvelle baisse des dotations aux collectivités.

Elle propose donc au gouvernement un nouveau pacte de confiance entre l’Etat et les collectivités territoriales, dit « pacte de Cenon », s’orientant autour de trois points :

  • La garantie des ressources des collectivités territoriales sur un temps long pour sécuriser les finances locales ;
  • Une plus grande liberté d’emploi des dotations d’investissement aux collectivités territoriales conforme au principe de libre administration des collectivités ;
  • Un renouveau de la contractualisation entre l’Etat et les collectivités territoriales sur les grands enjeux des politiques d’avenir comme la santé, le grand âge, la petite enfance, la sécurité ou encore l’environnement.
  1. Le bloc local doit être un acteur conséquent de la résilience des territoires et préparer les transitions de demain

Au cours de la crise sanitaire, les élus des petites villes ont été porteurs de solidarité et de dynamiques territoriales. Ils peuvent et doivent contribuer à résorber les fractures territoriales notamment dans les domaines de la santé, du logement et contribuer à la transition écologique et à la mise en place d’une économie circulaire.

  • Offre de soins : pour une santé de qualité et de proximité

La crise sanitaire a cruellement mis en évidence les carences et les limites d’un système de soin hypercentralisé, fondé sur une logique comptable et financière. La désertification médicale est une réalité de plus en plus préoccupante dans nombre de territoires, alors que la fracture vaccinale oppose à nouveau la France des métropoles et celle des territoires périphériques.

Dans cette optique, l’APVF réitère ses principales propositions :

  • La création de territoires prioritaires de santé ;
  • Une réforme profonde de la gouvernance des ARS ;
  • Une implication et une mobilisation réelle des élus locaux dans la gestion hospitalière ;
  • La mise en place d’un véritable plan Grand Age et Vieillissement, qui prépare nos collectivités à la nouvelle place que les « seniors » occuperont dans les prochaines années.
  • Logement : accélérer le renouvellement du parc de logements sociaux et améliorer le cadre de vie

Concernant la politique du logement, l’APVF rappelle tout d’abord son soutien aux objectifs de la loi SRU, une ambition républicaine à défendre et pérenniser, emblématique du vivre-ensemble, même s’il convient de prévoir quelques adaptations pour des situations très particulières liées à l’absence ou au coût du foncier.

Face à la pénurie de logements, il convient de mettre en œuvre une politique beaucoup plus ambitieuse qui s’attaque fortement à l’habitat indigne et qui mobilise les outils fiscaux et financiers pour rendre la réhabilitation plus attractive. A ce titre, l’APVF souhaite que les sommes allouées au titre des fonds friches ne soient pas majoritairement fléchées sur les grandes villes et que l’accent soit mis sur la mixité sociale dans les centres anciens.

Enfin, il faut encourager financièrement les Maires bâtisseurs et en en tout premier lieu ne pas pénaliser ceux qui construisent du logement social.

  • transition écologique : mettre les territoires au cours de l’action environnementale

L’APVF rappelle tout d’abord que les objectifs définis par le GIEC sur la lutte contre le réchauffement climatique ne seront pas atteints, notamment pour notre pays. Elle appelle donc à accélérer la transition écologique en mettant les territoires au cœur de cette politique.

Il est donc essentiel de replacer les collectivités, et notamment le bloc local, au cœur de la transition écologique et de là, donner les moyens humains et financiers de créer, dans le cadre du plan de relance, une industrie verte au service des territoires.

Les politiques de sobriété foncière dans le domaine du logement doivent enfin être fortement encouragées.

  • De nouvelles responsabilités doivent être confiées aux élus locaux pour en faire des décideurs pleinement légitimes

La crise sanitaire l’a amplement démontré, les Maires ont été en première ligne et ce sont les élus auxquels les citoyens accordent le plus leur confiance. Or la plupart des réformes institutionnelles, depuis un certain nombre d’années, et encore plus la conception des collectivités territoriales qu’entretient la haute administration de l’Etat entretient, témoigne de la persistance d’une certaine forme de défiance à leur égard. L’APVF appelle à la restauration de relations véritablement confiantes entre l’Etat et les collectivités.

  • Décentralisation : accorder plus de souplesse aux maires dans l’exercice de leurs compétences et renforcer la gouvernance locale

A cet égard, si le texte appelé 3Ds, en cours de navette parlementaire, apporte des ajustements et des simplifications bienvenues, il est encore loin, malgré les apports du Sénat en première lecture, de répondre aux attentes des élus locaux.

Tout en assurant une stabilité institutionnelle, il convient de tirer les leçons de la crise sanitaire en confortant le rôle des élus locaux et en améliorant la collaboration avec les services déconcentrés de l’Etat.

Dans cette perspective, l’APVF souhaite avoir l’assurance du gouvernement que le texte de loi 3Ds soit discuté et adopté au Parlement d’ici la fin de l’actuelle législature. Elle demande en outre :

  • Un ajustement de la loi NOTR(e) pour doter le bloc local d’une compétence d’aide directe aux entreprises en difficulté en cas de situation économique ou sécuritaire particulière ;
  • Une amélioration de la coordination entre élus et services déconcentrés de l’Etat en créant dans chaque département un délégué territorial de l’ANCT ;
  • Un renforcement significatif des instances de dialogue et de coordination entre niveaux de collectivités, et notamment des conférences territoriales d’action publique (CTAP) pour faire de cette instance la « vigie » de la présence des services publics sur le territoire.
  • Statut de l’élu : renforcer les garanties accordées aux élus et conforter la démocratie locale

Enfin, l’APVF demande un approfondissement des mesures contenues dans le texte de loi « Engagement et proximité » qui passe par un renforcement du statut des élus :

  • La revalorisation des indemnités des élus des petites villes ne doit pas être un tabou ;
  • Il faut sécuriser les sorties de mandat pour favoriser plus largement l’accès aux fonctions électives locales ;
  • Et clarifier la loi de responsabilité pénale et réorienter les poursuites vers la personne morale.

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A l’issue de ces XXIIIe Assises les élus des petites villes ont une conviction qu’ils entendent partager à tous les niveaux de l’Etat : une large part de l’avenir du pays se joue dans les petites villes. La relance économique, la réindustrialisation du pays, son attractivité, c’est chez nous que cela se passe !

L’APVF entend préciser et développer toutes ces propositions en adressant dès janvier 2022 un Manifeste des Petites Villes à l’ensemble des candidats à l’élection présidentielle en leur demandant de se positionner et de s’engager clairement. Elle vous donne d’ores-et-déjà rendez-vous en septembre 2022 pour nos XXIVe Assises des Petites Villes.

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