
La commission sénatoriale de l’Aménagement du Territoire et du Développement durable a adopté un rapport intitulé “Inégalités territoriales d’accès aux soins : aux grands maux, les grands remèdes”. Outre un bilan sur la dégradation de l’offre de soins, ce rapport d’information présente une série de 38 recommandations, avec notamment des préconisations sur la régulation à l’installation des professionnels de santé.
Un constat : les limites de la “politique des petits pas”
La commission sénatoriale de l’Aménagement du Territoire et du Développement durable, que préside M. Jean-François Longeot, sénateur Union Centriste (UC) du Doubs, brosse le portrait inquiétant de la dégradation de l’offre de soins.
Le rapporteur, M. Bruno Rojouan, sénateur Les Républicains de l’Allier, a indiqué dès 2022 que le pays entrait dans une “décennie noire médicale” où le nombre de médecins généralistes devrait décroître jusqu’en 2028, pour passer sous le seuil de 92 500 praticiens.
Pour faire face à cette situation, une série de mesures parlementaires, manquant de cohérence selon les sénateurs, ont été adoptées au cours des dernières années. Aucun projet de loi dédié n’a cependant été déposé par les derniers gouvernements. Les principales mesures concernent la mise en place d’incitations financières, qui selon les sénateurs, n’ont eu que des “effets minimes”. Les conventions signées entre l’Assurance Maladie et chaque profession de santé, permettant une régulation de l’offre dans les territoires les mieux dotés, ont par contre, obtenu des résultats, comme l’a démontré l’exemple de l’installation des infirmiers. La commission sénatoriale indique que les médecins sont désormais la seule profession médicale à bénéficier d’un cadre purement incitatif.
Un autre “gisement” pour dégager du temps médical aux soignants a été la recherche de la diminution de la charge administrative. Cela s’est par exemple traduit par le déploiement d’assistants médicaux, le développement de l’exercice collectif, ou encore l’extension des compétences des professionnels de santé.
Toutefois, ces mesures, aussi nécessaires qu’elles soient, ne permettent pas de compenser le déficit structurel du nombre de soignants. Or, le “choc d’offre” concernant le nombre d’étudiants en santé n’a pas eu lieu. Les sénateurs soulignent qu’en dépit d’une hausse du nombre d’étudiants, celle-ci est “insuffisante” pour répondre aux besoins futurs de soignants.
Des réponses qui appellent un changement de paradigme
Pour répondre à l’urgence de la situation, les sénateurs demandent une régulation de l’installation des médecins dans les zones les mieux dotées et favoriser leur exercice dans les zones les moins bien dotées en médecins. Les sénateurs sont prêts à laisser les modalités du zonage aux médecins eux-mêmes dans un premier temps, bien que le législateur pourrait s’y substituer en cas d’inertie trop importante de la profession.
En outre, du fait de l’augmentation du nombre de médecins, les sénateurs appellent à “définir un cadre de régulation de l’installation plus ambitieux, qui s’appuierait sur le conventionnement sélectif par l’Assurance maladie”.
Un autre axe privilégié par les sénateurs est de “redonner du temps médical aux patients”. Véritable serpent de mer, la question de la diminution de la charge administrative pourrait se traduire par des aides plus importantes pour l’embauche d’assistants médicaux ou par la “rationalisation du cadre d’exercice des sages-femmes”.
Enfin, les sénateurs proposent de mener à bien le “choc d’offres” de professionnels de santé, via le renforcement de l’attractivité des filières. Cependant, la “hausse du nombre d’étudiants dans les filières de santé n’aura de pertinence à long terme pour résorber les inégalités territoriales d’accès aux soins que si elle est territorialisée”. Les sénateurs appellent donc à “sortir d’une approche « CHU-centrée » des formations et procéder à un choc de territorialisation est donc essentiel”.
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