Refondation de l’Etat local : l’APVF se prononce pour une véritable déconcentration

10 juillet 2025

Face au constat d’une action de l’État éclatée, illisible et peu efficace, le Premier ministre François Bayrou a présenté, le 8 juillet 2025 à Chartres, les grands axes de sa réforme de l’Etat territorial. Un décret devrait être présenté en ce sens en Conseil des ministres la dernière semaine de juillet.

La réforme devrait se structurer autour de deux leviers majeurs : le renforcement du pouvoir de pilotage des préfets et l’élargissement de leur capacité d’adaptation locale.

1. Renforcement du rôle stratégique du préfet

Jusqu’à présent, le préfet avait un rôle central dans la coordination de l’action de l’État localement, mais sans disposer d’un véritable levier sur les services déconcentrés spécialisés (éducation, finances publiques, santé…) ni sur les opérateurs nationaux présents dans les territoires. Son pouvoir restait largement administratif et consultatif, limité par les prérogatives sectorielles des ministères et des établissements publics nationaux.

La réforme marque une rupture nette en consacrant le préfet comme véritable autorité de pilotage stratégique au niveau local. Il est qualifié par le Gouvernement de “chef d’orchestre” de l’action territoriale de l’État, ce qui signifie :

  • Il est désormais associé aux processus de nomination, d’évaluation et de fixation des objectifs des chefs de services déconcentrés, y compris ceux n’étant pas sous son autorité directe, comme les directeurs départementaux des finances publiques ou les responsables de l’Éducation nationale.
  • Il devient délégué territorial unique des grands opérateurs de l’État (ANCT, Ademe, Anah…), ce qui lui permet de donner des directives, demander des réexamens, et suspendre temporairement des décisions locales prises par ces établissements lorsqu’elles ont un impact territorial significatif.
  • Il bénéficie d’un droit de regard renforcé sur les subventions et aides versées localement par ces opérateurs, y compris sur les projets d’aide financière significative. Ces entités devront également transmettre chaque année un bilan d’activité local au préfet.

2. Pouvoirs accrus d’adaptation locale et de dérogation

Avant la réforme, le pouvoir de dérogation du préfet était encadré par un décret de 2017 généralisé en 2020, qui limitait les dérogations possibles à sept domaines précis (urbanisme, logement, action sociale, etc.), et uniquement sur des décisions individuelles. Ce pouvoir, bien que théoriquement utile, était peu utilisé du fait d’une insécurité juridique, d’un manque d’instruction claire, et d’une certaine frilosité administrative.

Le Gouvernement a décidé de supprimer ces limitations thématiques, pour permettre au préfet de déroger à toute norme relevant de son champ de compétence, dès lors qu’il s’agit de décisions individuelles (non réglementaires). Ce pouvoir sera consacré par la loi, pour sécuriser pénalement les préfets et lever les blocages administratifs.

Par ailleurs, le préfet se voit attribuer de nouveaux leviers d’intervention sur la structuration territoriale des services publics :

  • Il émettra désormais un avis préalable obligatoire sur toute modification de l’implantation de services ouverts au public, y compris la carte scolaire du premier degré, l’organisation des services des finances publiques, et les projets de réorganisation de l’offre de soins portés par les ARS.
  • La fongibilité des crédits de l’État est élargie au plan local, sous son autorité, pour permettre l’arbitrage entre différentes actions financées, en fonction des priorités territoriales.
  • Enfin, la territorialisation des appels à projets devient la règle : les campagnes de subvention à destination des collectivités, entreprises ou associations ne seront plus pilotées par les administrations centrales, mais sous la responsabilité locale du préfet.

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