Commerce de centre-ville : des clefs pour faire face aux mutations

11 septembre 2025

Philippe Le Goff, maire de Guingamp (22), membre du conseil d’administration de l’APVF, a été auditionné dans le cadre d’une mission d’information visant à redynamiser l’activité commerciale.

Frédérique MACAREZ, maire de Saint-Quentin, Dominique SCHELCHER, PDG de Coopérative U et Antoine SAINTOYANT, Directeur de la Banque des Territoires, représenté par Magali Da Silva,  de la Banque des Territoires, se sont vus confier une mission nationale sur l’avenir du commerce de proximité, tant dans les centres-villes que dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV). Cette mission s’inscrit dans un contexte de mutation profonde du commerce et vise à proposer des solutions concrètes et adaptées pour soutenir et réimplanter des commerces essentiels à la vie des habitants. Les conclusions permettront d’éclairer les choix du gouvernement dans le cadre de sa politique de soutien aux territoires et au commerce de proximité.

Le constat : un commerce en mutation

En avant-propos, M. Le Goff a souligné le travail de l’APVF et de la commune de Guingamp sur les questions de commerce depuis 2014.

Le premier constat : il existe plus d’offres que de demandes.

Le commerce est en pleine mutation avec le numérique. La question logistique est désormais incontournable.

Cela affecte les modalités d’urbanisation, avec la place des centralités qui est redéfinie par le numérique.

Une approche plurielle est nécessaire pour répondre à ces enjeux.

Les sondages d’opinion laissent apparaître que le facteur numéro 1 pour la venue en centralité est la convivialité et l’évènementiel. On ne vient pas uniquement pour consommer désormais. Cela appelle un changement de paradigme, centré sur la désirabilité.

Autre constat, le consommateur est souvent plus compétent que le vendeur. Cela appelle une adaptation des commerçants.

Une autre tendance : la place de la vente au producteur ou du commerce non sédentaire. Cet aspect est longtemps apparu comme un concurrent du commerce traditionnel ; cela remet du moins en cause les modalités traditionnelles de consommation. Cela vaut notamment pour le commerce alimentaire, avec par exemple le développement de la vente à la ferme.

Comment tenir compte de la demande en commerce non-sédentaire ? A Guingamp, il y a un marché le vendredi et le samedi, dans une organisation standard. En tant que VP commerce de l’intercommunalité, M. Le Goff appelle à l’hybridation des fonctions pour favoriser l’aménagement temporaire pour accueillir ce type de commerces.

Penser la transformation des commerces de demain

Comment soutenir cet écosystème territorial ? Se pose la question de la préparation des transformations de commerce de demain, ce qui appelle des questions d’aménagement au sein des collectivités. Quelles reconversions en termes d’offres dans les zones périphériques ? Assise sur un foncier qui est désormais une mine d’or : si jamais ce foncier est libéré, quelle implantation favoriser ? M. Le Goff émet la proposition d’un diagnostic commercial obligatoire dans le cadre d’un PLUI pour objectiver la situation et permettre d’appréhender les logiques commerciales au regard de la démographie. Comment développer des logiques d’implantation qui ne s’inscrivent pas dans des logiques de déplacement ? Un assouplissement des procédures est par ailleurs nécessaire.

Du point de vue de l’urbanisme, il est nécessaire de renforcer les centralités.

S’agissant des acteurs, il faut accompagner les commerçants dans les transformations du secteur. L’étude de marché, par exemple, doit laisser la place à une étude de différenciation. Une logique d’hybridation du commerce a de plus en plus cours. Comment organiser des événements croisés entre différents commerces ? Comment organiser son commerce, par exemple avec l’installation de point relais pour les colis, selon le type de commerce ? Cela appelle à mettre en œuvre une logique de formation des commerçants. Il faut leur redonner de la confiance, à travers des formations d’un an avec des nombre réduits de commerçants, très motivés. Ce type d’initiative aurait un fort effet de levier.

L’accompagnement doit être celui des modes de pensée, de façon à structurer tout un écosystème.

Adapter le commerce à la démographie et aux usages

Quid de la fiscalité et de la vacance commerciale ? Il n’y a plus de vacance commerciale à Guingamp. La vacance commerciale s’explique par un linéaire commercial qui ne correspond pas à la démographie de sa collectivité ou le commerce a besoin d’un réenchantement pour créer un nouveau narratif à l’installation du commerce. En cas de défaillance, la commune de Guingamp travaille commerce par commerce pour assurer la reprise, le plus important étant l’environnement commercial.

S’agissant de la fiscalité, les chèques cadeaux offrent un effet levier très important, notamment en cas de collaboration avec les employeurs.

Il existe une décorrélation entre l’activité économique et le coût immobilier. Pour y répondre, il peut parfois être nécessaire d’accepter les friches. Cela a beau être contre-intuitif, l’effet est appréciable sur le coût du foncier.

Antienne des codes Naf dans les documents d’urbanisme : les inscrire serait ne pas prendre en compte les mutations du commerce. Ce serait s’encalminer dans des représentations. Cela n’exonère pas de disposer d’une lecture assez fine des différentes fonctions selon les lieux d’implantation dans la commune. Disposer d’un droit de préemption communal, notamment sur les commerces de bouche, permet d’avoir une approche assez fine, en objectivant les prix des transactions et de disposer d’une vision de la bonne santé commerciale.

S’agissant de la sécurité, certains commerces peuvent amener des comportements de mendicité ou de pratiques addictives qui peuvent constituer un frein au flux commercial. Un travail fin avec les forces de l’ordre est nécessaire. Comment garantir une sécurité plus effective, mais également comment dégonfler un certain sentiment d’insécurité ? Il est nécessaire de perfuser dans les foyers pour modifier les perceptions.