3 questions à … Jean-Marc Zulesi, Député – France Mobilités

17 décembre 2019

Pouvez-vous nous présenter la démarche France Mobilité ?

France Mobilités est née des ateliers de l’innovation, lancés dans le cadre des Assises de la mobilité de l’automne 2017 que j’ai eu l’honneur de présider.

Dans le cadre des ateliers, avec des représentants des collectivités, des entreprises, des opérateurs et des startups nous avons formulé 35 recommandations pour lever les verrous à l’innovation dans les mobilités. Notre premier constat c’était que l’innovation existe et se développe dans les territoires. La puissance publique doit être en capacité de mieux l’accompagner et surtout de la mettre en lumière.

Si certaines de ces mesures ont pu trouver leur place dans la Loi d’Orientation des Mobilités (LOM) que nous venons de voter, nous nous sommes rendu compte que de nombreuses réponses sont à trouver sur le terrain.

La Loi ne peut pas tout et nous avons décidé, sous l’impulsion d’Elisabeth Borne, de préparer un plan d’action, lancé en juin 2018, afin d’accompagner les territoires dans leurs démarches d’innovation.

Concrètement France Mobilités c’est une interface unique, transversale au sein du Ministère des Transports, qui a pour but d’aider au montage de projets innovants en particulier dans les petites villes.

Notre plan d’action se décline en six axes, coordonnés par le Ministère des Transports.

Tout d’abord un « facilitateur » qui aide les porteurs de projets via un guichet unique. Celui-ci s’appuie sur une plateforme collaborative en ligne qui permet de valoriser les solutions existantes et rapprocher les porteurs de projets et les collectivités. Enfin nous développons un service de soutien à l’ingénierie dans les collectivités qui n’ont pas les ressources suffisantes pour développer des projets en territoires peu denses.

En parallèle nous cherchons à créer une culture commune de l’innovation par le biais de cycles de rencontres et de formation pour porter la culture de l’innovation dans les mobilités au niveau territorial.

Pour accompagner ces projets nous voulons faciliter le recours à des solutions innovantes par les acheteurs publics par le biais de formation et de guides de bonnes pratiques, en s’appuyant sur les exemples qui marchent.

Enfin, comme pour tout projet, le financement reste le nerf de la guerre. C’est pourquoi France Mobilités a pour objectif de donner aux acteurs de la mobilité (entreprises, centres techniques, collectivités) de la visibilité sur les aides publiques disponibles pour soutenir leurs projets.

En définitive avec France Mobilités, l’ingénierie publique se met au service des territoires pour apporter des réponses concrètes, personnalisées selon chaque situation et adaptées à chaque territoire.

 

Quels sont selon vous les enjeux en matière de mobilité dans les petites villes ? Le projet d’orientation des mobilités y répond-t-il ?

Les politiques de mobilité menées au cours des trente dernières années se sont concentrées sur le développement des axes interurbains pour relier entre elles les métropoles. C’est ce qui nous permet aujourd’hui d’avoir l’un des systèmes de transports nationaux les plus efficaces au monde.

Cependant les territoires ont été oubliés. On ne peut pas organiser la mobilité dans les territoires, dans les zones peu denses, depuis Paris.

Aujourd’hui la priorité dans les petites villes, et dans les zones périurbaines et rurales environnantes, c’est d’assurer la connectivité. Il faut permettre à chacun de se rendre en centre-ville mais sans dépendre de sa voiture. Concrètement il faut réinsérer du service public de transport collectif, organisé et optimisé en fonction des flux et des besoins de chaque territoire.

En parallèle l’évolution technologique nous offre de nouvelles solutions de mobilité, que ce soit le vélo en libre-service, le covoiturage ou encore l’autopartage. Ce sont de nouvelles options de mobilité individuelle et partagée dont nous devons nous saisir afin de répondre au grand défi de notre temps à savoir la transition écologique.

Le deuxième enjeu c’est donc de sortir de l’autosolisme, et de la dépendance à la voiture par de nouveaux modes partagées et plus propres.

Le troisième enjeu c’est l’accessibilité, en particulier le prix. Tout le monde doit pouvoir avoir accès aux transports. Pour cela il faut mutualiser les moyens entre les territoires, entre les villes, afin de réduire les coûts. Il faut également que les grandes collectivités et la puissance publique contribuent à ces services essentiels.

Pour répondre à ces enjeux la LOM repense la gouvernance de la mobilité. Elle charge les EPCI d’organiser les politiques de transports sur leurs territoires en tant qu’Autorités Organisatrices de la Mobilité (AOM). Ces AOM auront pour mission d’organiser la mobilité à l’échelle des bassins de vie, afin que les politiques menées répondent réellement aux besoins des usagers au quotidien.

 

Comment France Mobilité peut-elle accompagner les petites villes face à ces différents enjeux ?

La complexité des réglementations, les lourdeurs administratives, les difficultés de financement sont autant d’obstacles au lancement de projets qui peuvent changer la vie des usagers au quotidien. Les bons projets existent déjà sur le terrain, mais souvent ils ne dépassent pas la phase d’expérimentation. Avec France Mobilités nous voulons simplifier le passage à grande échelle.

France Mobilités pourra accompagner les petites villes, répondre à leurs questions, et les aider à faire sortir de terre les beaux projets et les bonnes idées. Pour être le plus pertinent possible des cellules d’ingénierie régionales sont progressivement créées. L’objectif est qu’elles soient toutes opérationnelles au premier trimestre 2020. Elles rassembleront des agents du Cerema, de l’Ademe, de la banque des territoires et des directions régionales de l’Environnement, de l’Aménagement et du Logement (Dreal), afin d’accompagner les collectivités et les entreprises sur le terrain.