Vincent Chauvet : “Aucun agent municipal n’a manqué à l’appel”

17 avril 2020

Vincent Chauvet, Maire d’Autun, Saône et Loire (14 000 habitants), répond à nos questions sur la gestion de la crise sanitaire dans sa commune.

 

Quelle est la situation sanitaire sur votre territoire ?

La Bourgogne-Franche-Comté fait partie des régions qui ont été les plus touchées dès le début de la crise. Dijon, Besançon, tout comme Chalon-sur-Saône et Macon pour la Saône et Loire, ont été en première ligne. Le Morvan, qui se situe plus à l’écart des axes de communication et des grandes agglomérations, a été touché plus tardivement et de manière moins intense, pour le moment, que le reste de la Région. Président du Conseil de Surveillance de l’Hôpital d’Autun, dont le périmètre d’intervention SMUR s’étend sur le vaste secteur rural du Parc naturel régional du Morvan, j’ai suivi pas à pas la mise en place de l’unité COVID-19. A ce jour, 6 patients testés positifs y sont suivis, aucun n’est en réanimation et nous n’enregistrons à ce jour aucun décès lié au COVID sur la commune. Toutefois, nous avons de grandes difficultés à obtenir des chiffres à jour et par établissement hospitalier, de la part de l’ARS. Quoiqu’il en soit, je veux remercier les soignants dans les établissements hospitaliers et les EPHAD, toutes celles et ceux qui prennent soin au quotidien des personnes fragiles avec beaucoup de courage, et de sens du devoir. Je veux remercier tout autant celles et ceux qui sont en deuxième ligne pour faire en sorte que la vie continue, toutes ces professions qui d’ordinaire nous paraissent invisibles et sur lesquelles nous nous reposons aujourd’hui.

 

Comment sont mobilisés vos agents municipaux dans cette période de crise ?

Aucun agent municipal n’a manqué à l’appel. C’est tout à fait révélateur de la loyauté et du dévouement qui animent les agents de la fonction publique territoriale. C’est malheureusement trop souvent dans ces moments difficiles que les usagers mesurent le sens et l’importance des métiers exercés par nos agents publics. Toutes et tous ont pris très à cœur leurs missions chacun de leurs prérogatives. Dès le lendemain de l’annonce du Président, j’ai réuni toutes les directions pour identifier les priorités d’action, les ressources mobilisables et les délais pour mettre en place, en un temps record, un mode de fonctionnement dégradé de l’administration territoriale permettant d’assurer la continuité du service public. Nous avons placé en confinement les agents qui présentaient des risques médicaux, les agents devant garder des enfants et pour lesquels le conjoint ne pouvait pas sont aussi resté chez eux. Pour d’autres, nous avons activé les outils et procédures nécessaires au télétravail, avec des reportings quotidiens entre agents, chefs de service et direction générale, cabinet et élus. L’Hôtel de ville et de nombreux équipements sont fermés au public, mais nous assurons une permanence physique, téléphonique et internet continue à la Direction Générale au Cabinet du Maire et à l’état civil.

Nous avons dans un premier temps travaillé sur les services absolument essentiels à la population : avec l’intercommunalité l’accueil des enfants de soignants, la collecte des déchets, la police municipale, l’état civil pour les naissances et les décès… Puis dans les jours suivants, tout ce qui pouvait apporter une plus-value pour permettre aux citoyens de rester chez eux sereinement pendant le confinement, et à celles et ceux qui devient travailler de le faire dans les meilleures conditions.

 

Avez-vous le sentiment que les mesures de confinement sont correctement respectées et acceptées par vos administrés ?

Globalement oui, l’immense majorité des Autunois se sont rangés à cette situation tout à fait exceptionnelle et aux mesures inédites qui s’y rapportent. Comme partout, quelques-uns ont pensé pouvoir s’en affranchir mais des verbalisations et des interpellations sont intervenues. Je crois que la pression sociale à rester chez soi est devenue plus forte que l’esprit d’aventure. Pour autant, nous avons surveillé avec attention au début du confinement le déplacement de population des métropoles vers les nombreuses résidences secondaires du Morvan, avec la crainte d’une propagation plus rapide de l’épidémie, pour adapter nos moyens de prise en charge sanitaire pour y faire éventuellement face. Pour celà, l’opérateur Orange a pu nous fournir très vite des données de population grâce à la trace des téléphones mobiles que nous collectons de manière anonyme et agrégée, au départ dans le cadre du Plan Action Coeur de Ville pour les données touristiques et commerciales, et désormais dans un but sanitaire. Par ailleurs, je suis ravi que des aménagements de sortie aient pu être accordés pour les familles ayant des enfants atteints d’autisme, c’était important, tout comme nous avons un œil particulièrement attentif sur les violences intra familiales, malheureusement accentuées en ce temps de confinement.

 

Avez-vous mis en place des mesures supplémentaires par rapport à celles annoncées par le Gouvernement pour assurer la sécurité sanitaire ?

Je crois que le cadre fixé par le Gouvernement est à la hauteur de la situation gravissime que nous vivons. Après, il revient à chaque élu, qui connait parfaitement les spécificités de sa commune, de ses infrastructures, de ses acteurs économiques, associatifs, de juger comment adapter le mieux les consignes générales aux spécificités locales. Certains maires ont souhaité faire de la surenchère parfois à visée électoraliste en prenant des arrêtés municipaux pour limiter encore davantage le périmètre de déplacement, le nombre de sorties, etc. Pour ma part, j’ai souhaité offrir la plus grande transparence, donner et redonner le maximum d’information aux citoyens. Bien sûr, je relaie en temps réel toutes les informations utiles à la population, mais je tiens aussi chaque jeudi soir à 19h00 un direct vidéo sur Facebook où je fais le point sur toutes les informations en ma possession sur la situation d’Autun face au Covid-19, et prend les questions en direct pour y apporter des réponses. Je m’appuie énormément sur mes adjoints qui chacun dans leurs délégations prennent les choses en main. Ils animent ensemble une hotline 24/24 7/7 sur un numéro dédié pour répondre aux citoyens. Avec les services de la ville et du CIAS, ils traitent chaque cas particulier pour qu’aucun citoyen soit accompagné dans la mesure de ce que nous pouvons faire.

 

Comment organisez-vous la solidarité sur votre territoire, notamment à l’égard des personnes fragiles et isolées ?

C’est je crois la question qui m’a le plus préoccupée dès les premières heures de la crise. D’abord, nous avons la chance d’avoir un centre intercommunal d’action social bien structuré et efficace en temps normal, et qui a parfaitement su adapter son fonctionnement à cette période complexe. Nous avons fait le choix, le 16 mars, avec les élus et les services, de recenser le plus exhaustivement possible l’ensemble des producteurs locaux, commerçants pouvant apporter des livraisons à domiciles, les structures de service à la personne, toutes les informations pratiques et avons mis sous plis plus de 7 000 courriers en travaillant avec La Poste en local pour parvenir au meilleur acheminement. Malgré l’omniprésence des réseaux sociaux, il fallait que l’information imprègne toute la population et que personne ne reste sur la touche.

 

Des formes de solidarité existent-elles entre les collectivités de votre territoire ?

Oui, particulièrement sur l’échange de bonnes pratiques. Dans ce contexte, on ne peut que compter sur l’intelligence collective. En cela j’ai moi-même pris conseil auprès d’autres élus, notamment au sein des associations de maires départementaux, sur des sujets comme l’ouverture des marchés, l’organisation du service postal, la collecte des déchets, les commandes de masques, etc. Mon rôle de référent départemental de l’APVF m’a permis d’établir ces derniers mois des échanges fructueux avec les sections départementales de l’AMF comme de l’AMRF. Nos responsables de services sont aussi en permanence dans l’échange avec leurs homologues d’autres collectivités pour partager ce qui fonctionne et les points de vigilance. En cela le rôle des associations d’élus ou de directeurs est très important pour créer des passerelles.

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