Petites villes : comment exister et peser au sein des nouvelles grandes régions et des nouvelles intercommunalités?

1 juin 2016

Carole Delga, présidente de la région Midi-Pyrénées, évoque tout d’abord le mandat de maire qu’elle a exercé puis celui de présidente de région. Pour elle, la fonction de maire s’est fortement complexifiée. Elle insiste sur le rôle essentiel du dialogue entre les différents territoires et le conseil régional et rappelle qu’à l’époque de la présidence de Martin Malvy, il y avait une grande écoute et une attention à ce que la politique régionale soit adaptée à tous les territoires. Dans la nouvelle grande région, les nouveaux élus et les institutions devront faire incarner la région dans tout le territoire. Il y a donc une maison de la Région dans chaque département. Elle évoque également la question de la l’Assemblée des territoires et de la place de ces derniers en son sein.

 

Pierre Jarlier, Maire de Saint-Flour, 1er Vice-Président Délégué de l’APVF, explique tout d’abord qu’il existe un enjeu considérable avec les Schémas régionaux d’équilibre, dans lesquels les petites villes doivent trouver leur place. Il rappelle qu’il faut aussi une harmonie en dehors des métropoles. Pour lui, les petites villes constituent des lieux où l’on peut développer la qualité de vie et le lien social. Elles doivent donc prendre toute leur place dans l’intercommunalité. Par leur action, les maires touchent à tous les sujets tandis que la région aura des compétences d’aménagement du territoire. Elle constitue un partenaire majeur. Les maires des petites villes ont tout intérêt à profiter de cette dynamique pour créer un lien entre la région et les territoires. Ils font face à un phénomène de mutation. A partir du moment où il y a des orientations dans les grandes intercommunalités autour des petites villes, il faudra une région et un Etat qui contractualisent pour accompagner ce développement. Les maires veulent être mieux accompagnés et organisés. Ils ont les outils, à eux de s’en saisir.

 

Christine Bost, Maire d’Eysines, vice-présidente de Bordeaux métropole et  première vice-présidente du conseil départemental de Gironde, s’interroge sur le rôle du département dans une phase de transition. Elle rappelle que les cadres législatifs nouveaux sont institués et donnent une prédominance à la région. Dès lors, il convient de s’interroger sur le rôle des départements au moment où les régions s’installent, et que cela devrait prendre du temps. Alain Rousset estimait ainsi à un mandat le temps de la prise des compétences totale et de leur assimilation par les régions. Dès lors, les départements doivent jouer un rôle d’assembleur, d’animateurs de projets de territoires. Elle revient sur le territoire de Bordeaux métropole, qui compte 1,5 millions d’habitants dont 50% dans la métropole. Les élus du conseil départemental ont divisé la Gironde en neuf territoires et définissent avec les acteurs de ces territoires les projets et les enjeux prioritaires sur la durée du mandat avec, outre la question de la capacité financière du département, celle de savoir comment le département les accompagne dans l’animation dynamique du territoire. C’est la feuille de route pour faire en sorte que la centrifugeuse crée une émulsion pour tirer le territoire départemental vers le haut.

 

Jean-Pierre Balligand, président de l’Institut de la décentralisation, évoque un phénomène majeur qui est intervenu avec la loi MAPTAM : la création des métropoles, dont l’impact est important. Il avance que la loi permet à la métropole d’accentuer la création de richesse. Il évoque ensuite la concertation territoriale. Il y a aujourd’hui un cadre fixé mais il faudra inventer des solutions pour que cela fonctionne. Dans la loi MAPTAM, il y a la CTAP à laquelle on peut donner un statut. Il rappelle que ces sont les élus de l’ouest de la France qui l’ont beaucoup fait avec la loi. Ils ont inventé une ingénierie territoriale différenciée. Il avance que sa grande crainte, en tant que président de l’Institut de la décentralisation, vient de l’articulation future entre métropole, régions et territoires. Il avance tout d’abord que le problème de fond ne vient pas des métropoles mais du no man’s land entre les métropoles et les périphéries. Dans cet hinterland, les petites villes sont fondamentales. Pour lui, c’est l’hinterland inframétroplitain qui doit être traité. Il est possible d’inventer un rôle actif au département. Le vrai enjeu des grandes régions est dans cette question. La logique des métropoles est d’être interconnectée au niveau mondial. La puissance publique doit inventer le rôle de l’inframétropolitain. Pour lui, les difficultés du haut du pays viennent de sa difficulté à manager le bas.

 

Philippe Laurent, Maire de Sceaux, Secrétaire général de l’Association des Maires de France, appelle à ce que l’ensemble des associations d’élus travaillent ensemble. Il insiste tout d’abord sur la volonté commune des élus locaux d’avoir de la stabilité. Avec la loi NOTRe, un cadre a été créé et l’organisation institutionnelle ne doit plus bouger. Il faut continuer à développer la contractualisation entre les collectivités et entre elles et l’Etat.  Il faut souligner l’importance de la CTAP, dont la présidence est assurée par le président du conseil régional. En Ile-de-France, cet outil n’est pas encore mis en place, et n’a pas été réuni. Il l’appelle de ses vœux parce que c’est le seul endroit où les élus peuvent régler leurs petits différends, notamment entre la Métropole du Grand Paris et la région. Cette CTAP doit devenir un lieu à partir duquel on peut développer ces contractualisations parce que cette situation  est de moins en moins homogène. Il y aura des schémas de contractualisation différents d’une région à l’autre. Il évoque également deux enjeux: d’abord celui de la métropolisation qu’il n’est pas nécessaire d’encourager parce qu’il se fait naturellement. Par conséquent, il ne faut pas l’encourager mais l’équilibrer. Les élus doivent faire preuve d’une capacité d’innovation parce que s’ils ne le font pas, l’Etat n’est pas à même de le faire. C’est au niveau des régions-territoires, et non institutionnelles, que cet équilibre doit être trouvé. Il note aussi l’enjeu du partage des ressources entre le niveau central et les niveaux locaux. Il ne peut pas y avoir des niveaux locaux qui ont de la fiscalité basées sur des bases obsolètes, au contraire de l’Etat. Pour un pays équilibré, il faut aboutir à une discussion sur le partage des grandes ressources fiscales. Cet enjeu sera celui des prochaines années.

 

Stephan Rossignol, Maire de la Grande-Motte, Président de la communauté d’agglomération du Pays de l’Or et Conseiller régional du Languedoc-Roussillon Midi-Pyrénées, fait le constat que la région est devenue essentielle avec la loi NOTRE. Il y a eu des mutations territoriales très importantes ces dernières années. Pour lui, aujourd’hui, les intercommunalités avec leur taille intermédiaire font le lien entre des grandes collectivités et l’échelon communal auxquels nos concitoyens sont attachés. Le Pays de l’Or, par exemple, travaille au rapprochement avec ses voisins, notamment de grande taille, comme la nouvelle grande région, et la Métropole de Montpellier et s’inscrit dans une logique de projet, comme celui de construire un grand port. Il conviendra de voir si ces rapprochements se traduisent sur un plan plus institutionnel. Il existe de nombreux carcans administratifs pour les élus qui souhaitent impulser des projets : entre le moment où une décision politique est prise et le moment où elle est appliquée peut s’écouler des années.

 

Cyril Meunier, Maire de Lattes, Vice-président de Montpellier Méditerranée Métropole, Conseiller départemental de l’Hérault, pense qu’avec l’émergence de Métropoles comme celle de Montpellier, les maires n’ont pas perdu de pouvoir. Ils peuvent développer des projets de territoire avec les grandes collectivités à proximité. La Métropole peut être une opportunité pour les petites villes à condition de monter des projets territoriaux.

 

Marc Abadie, Directeur du réseau et des territoires de la Caisse des Dépôts et Consignations, affirme que La Caisse des dépôts s’efforce d’accompagner les territoires dans les différentes transitions qu’ils connaissent (territoriales, financières, numériques) et qu’elle souhaite apporter les moyens aux territoires de développer l’ingénierie. Les métropoles doivent jouer leurs rôles de locomotives au profit des territoires et notamment des petites villes environnantes. La Caisse des dépôts développe le dialogue avec tous les partenaires territoriaux : métropoles, régions, mais également avec des territoires à taille humaine comme les petites villes, par la voie de la contractualisation.