L’APVF auditionnée par la mission parlementaire sur l’impact de la crise sur les finances locales

28 mai 2020

L’APVF représentée par son Président, Christophe Bouillon, et son Premier vice-président, Antoine Homé, a été auditionnée mardi 26 juin par la Mission sur l’impact de la crise sur les finances locales pilotée par Jean-René Cazeneuve, député du Gers.

Après avoir rappelé que l’Association des petites villes de France représentait les 4 059 petites villes de 2 500 à 25 000 habitants, qui comptabilisent 26 millions d’habitants, soit 38 % de la population, Christophe Bouillon s’est attaché à établir le premier bilan de la crise effectué par l’APVF, en lien avec son réseau des DGS, sur le budget des petites villes.

  • Des pertes de recettes fiscales et non fiscales liées à la fermeture des services et équipements publics, à la mise à l’arrêt de l’activité économique et à certaines décisions des municipalités elles-mêmes :

En 2020, les pertes de recettes fiscales seront concentrées sur les petites villes touristiques et ultramarines : taxe de séjour  ; octroi de mer (jusqu’à – 23,5 %) et taxe sur les passagers embarqués (jusqu’à – 54,2 %). A noter que certaines petites villes, et notamment les plus résidentielles, considèrent qu’elles seront impactées, dès cette année, par la baisse de la TLPE (-10 %) et de la taxe communale additionnelle à la taxe de publicité foncière et aux droits d’enregistrement (-30%).

En 2021 et en 2022, ce sont les petites villes économiques qui seront indirectement, mais sûrement, touchées par la baisse de CVAE et de CFE. En outre, l’arrêt ou le report des programmes et projets de constructions aura un impact certain sur les recettes de la taxe d’aménagement : dans les petites villes, cette perte est estimée à 30%.

Les recettes non fiscales des petites villes ne sont pas épargnées par la crise, bien au contraire. Il en va particulièrement des petites villes touristiques ou ayant de fortes charges de centralité. Nous notons une baisse importante des redevances d’occupation domaine public (droits de place et droits de terrasse, respectivement jusqu’à 20 000 et 40 000 € dans certaines petites villes), des redevances de stationnement (jusqu’à – 75 000 €), des recettes tarifaires liées à la restauration, transport et garderie scolaires (environ 45 000 €), des recettes liées à la culture, et particulièrement cinémas/théâtres (-70 000 €) et châteaux/musées (-20 000 €), des redevances camping municipal pour celles qui en disposent (-43 000 €), etc.

  • Des dépenses supplémentaires importantes, mais des économies parfois non négligeables :

La crise du « Covid » et les mesures prises pour limiter la propagation ont entrainé des dépenses supplémentaires dans les petites villes. Elles ont été justifiées principalement par la protection de la population – avec l’achat de produits pharmaceutiques (gels, thermomètres, virucides) jusqu’à 30 000 € dans certaines petites villes et de matériels divers (masques, pulvérisateurs, rubalises…) jusqu’à 90 000 € –, par les aides à la personne et aux commerces – appels à la population, livraison des repas et opération « bon d’achat » dont le coût peut monter jusqu’à 150 000 €. S’agissant des aides aux commerces et associations, si peu de petites villes ont contribué encore au Fonds national de solidarité, elles sont nombreuses à avoir accordé des subventions aux CCAS, aux clubs sportifs et aux associations. Le coût est très variable d’une petite ville à l’autre – et, enfin, pour les besoins du service, avec notamment du matériel EPI en plus (visières, sur blouses, gants, combinaisons, chaussures de protection, masques …) jusqu’à 50 000 euros ; du matériel en téléphonie (abonnements conférences, routeurs Covid, cartes SIM, clés 4G). Concernant les charges de personnel (recrutements, prime exceptionnelle, heures supplémentaires, etc), ce poste de dépenses n’est pas le plus déterminant.

La crise sanitaire a également été source d’économie parfois non négligeables. La principale source d’économie tient à l’annulation de manifestations, de fêtes et d’évènements culturels. D’une petite ville à l’autre, l’économie varie de 12 000 euros à 300 000 euros.

Une autre source d’économie concerne les dépenses à caractère général (réduction des fournitures, factures eau, gaz, électricité, carburant, annulation de frais de déplacement…) : estimation de cette source d’économie encore difficile, elle pourrait se chiffrer à 100 000 euros.

  • Certaines petites villes plus fragilisées que d’autres par la crise qui nécessitent une attention toute particulière :

On a tendance à considérer que les grandes villes ont été les plus impactées par la crise. Mais, comme le témoigne notre analyse, certaines catégories de petites villes sont particulièrement touchées et il convient d’avoir une attention particulière.

Il s’agit des petites villes touristiques, des petites villes ultramarines, des petites villes économiques et/ou résidentielles, des petites villes ayant de fortes charges de centralité et, bien sûr, des petites villes « clusters ».

Après cet état des lieux, Christophe Bouillon et Antoine Homé sont revenus sur les principales propositions de l’APVF pour sécuriser les finances locales afin de permettre aux élus des petites villes de jouer pleinement leur rôle dans la reprise et la relance de l’activité sur leur territoire.

  • Les principales propositions de l’APVF pour sécuriser les finances locales et soutenir l’investissement public :

L’APVF propose la création d’une dotation de fonctionnement spécifique et exceptionnelle « Covid-19 » limitée dans le temps afin de compenser les pertes de recettes et les charges nouvelles résultant d’une décision spécifique de l’Etat pour limiter la propagation de l’épidémie. Cette dotation exceptionnelle pourrait être financée au sein d’une nouvelle mission budgétaire temporaire intitulée « Plan exceptionnel de garantie des ressources des collectivités locales » et traitée en dehors de la norme de dépenses pilotables. De cette manière, la dotation spécifique « Covid-19 » serait indépendante de la DGF. Cette dotation « Covid-19 » serait accordée temporairement, le temps que les collectivités locales retrouvent un niveau de recettes équivalent à celui de 2019.

Ce dispositif pourrait s’accompagner d’un soutien complémentaire pérenne et ciblé sur les petites communes les plus en difficulté ou sur celles dont l’impact de la crise va être particulièrement violent. Cette aide complémentaire pourrait se matérialiser par un fonds de solidarité exceptionnel abondé par les collectivités locales les mieux préservées par la crise et par l’Etat.

L’APVF préconise un assouplissement du cadre budgétaire et comptable passant notamment par la suppression du dispositif contraignant d’encadrement des dépenses de fonctionnement (dits « contrats de Cahors ») qui impacte indirectement les petites villes, par l’assouplissement de la gestion des dotations d’investissement (report de l’échéance pour le dépôt des dossiers de candidature et versements partiels de DETR et DSIL au soutien des investissements publics locaux), par l’augmentation du plafond réglementaire des dépenses imprévues à 30 % et, enfin, par une facilitation du recours à l’emprunt pour les communes n’ayant pas encore voté leur budget.

Pour l’APVF, il serait opportun de retarder la nationalisation de la TH de deux ans : sans remettre en cause la réforme, ce report apparaît plus prudent à l’APVF. On sait que le nouveau schéma de financement aura un impact, dès 2022, sur les potentiels financiers et fiscaux des collectivités locales et sur la répartition des dotations. Il faut laisser le temps au CFL de travailler sur un dispositif correctif et surtout plus juste. Aussi, l’APVF s’oppose à toute remise en cause de la fiscalité économique locale (CVAE, CFE, versement mobilité) indispensable au développement économique local et à l’attractivité des territoires et ce, encore plus dans le contexte actuel.

L’APVF préconise enfin la création d’un Fonds national de solidarité territoriale ciblé à l’échelle de la région et alimenté par l’ensemble des collectivités locales volontaires. Un tel Fonds pourrait contribuer utilement à la mise en place de filières autour de l’économie circulaire, de l’alimentaire vertueux (circuit court, bio), du bâtiment (matériaux bio sourcés) et à la création de véritables éco systèmes permettant, à l’échelle des territoires, le développement de chaines logistiques cohérentes et durables (exemple de la filière bois).

Retrouvez la réponse au questionnaire de l’APVF en cliquant ici.