Sécurité et Prévention de délinquance : l’APVF auditionne Me Guillaume Jeanson, porte-parole de l’Institut pour la Justice (IPJ)

27 avril 2016

Me Guillaume Jeanson a entamé son intervention en évoquant l’étude de J. Bichot sur le coût de la criminalité pour la puissance publique : près de 80 milliards d’euros a minima seraient utilisés pour le traitement de la délinquance et de la criminalité en France. Selon Me Jeanson, appréhender la question du traitement de la délinquance à l’heure actuelle nécessite de préciser le contexte à l’aide de quelques remarques liminaires : la suppression de 13 700 postes de policiers nationaux et de gendarmes par le précédent gouvernement a reporté la question du traitement des incivilités sur l’échelon local. De fait, les policiers municipaux ont dû assumer des tâches relevant des compétences de la police nationale (tendance à la « judiciarisation » de la police municipale) et le bloc local a largement contribué à compenser ce désengagement de l’Etat, ce qui a impacté le budget des collectivités locales.

 

Selon Me Jeanson, parallèlement à ce mouvement, les maires ont gagné des compétences en ce qui concerne le traitement de la délinquance : il évoque la loi de 2007 qui a donné des outils aux maires pour agir sur les incivilités et le taux de criminalité. Il revient sur la notion de « community policing » qui renvoie à la police de proximité et à sa méthode qui privilégie la marche à pied, les liens directs et le dialogue avec les acteurs du territoire. La criminologie a démontré l’efficacité d’une telle police, à la portée des élus, plébiscitée par le porte-parole de l’Institut pour la Justice.

 

Me Jeanson revient sur la théorie de la « vitre brisée » qu’on a trop souvent associé à l’éloge de la tolérance 0. Pour rappel, il s’agit de l’idée que chaque dégradation, chaque incivilité doit susciter une réponse immédiate des pouvoirs publics pour éviter que ne s’installe un sentiment d’insécurité lié à un environnement dégradé.

 

Selon lui, à chaque fois qu’un élu est confronté à un acte de délinquance, la réponse publique doit dans un premier temps se concentrer sur la compréhension des facteurs, sur la chaîne qui a abouti à ce passage à l’acte à travers le dialogue et l’échange d’informations. Il insiste sur le rôle essentiel des Conseils locaux de sécurité et de prévention de la délinquance (CLSPD) en ce qui concerne l’échange d’informations entre acteurs publics et rappelle qu’il y a des facteurs sociologiques à prendre à compte. Il souligne d’ailleurs que la délinquance est souvent le fait de garçons, âgés de 12 à 25 ans.

 

Dans un second temps, le maire doit apporter une réponse graduée à l’acte en puisant les prérogatives dont il a hérité avec la loi de 2007 en prenant en compte que « plus on est jeune, plus on récidive ». Me Jeanson détaille plusieurs outils à la disposition du maire :

– le rappel à l’ordre (qui peut marquer un premier temps d’arrêt) ;

– la « transaction municipale » qui responsabilise l’individu et peut-être utile en cas de récidive. Cette transaction peut prendre diverses formes : remboursement à la collectivité, travaux d’intérêts généraux allégés etc.

 

Pour Me Jeanson, l’action du maire a été libérée par la loi de 2007. Selon lui, le maire a avant tout un rôle de coordonateur local en matière de prévention de la délinquance, en raison de sa proximité avec son territoire. Il peut organiser un maillage efficace, peut organiser des signalements effectifs en sa qualité de coordonateur du CLSPD. Avec l’émergence de la radicalisation religieuse, les enjeux de détection se posent avec une acuité toute particulière pour les maires.

 

Concernant le soutien aux victimes, Me Jeanson parle du développement depuis 2012 des bureaux d’aides aux victimes au sein des TGI : les élus peuvent jouer un rôle de pédagogie en faisant connaître ces lieux, en diffusant le numéro de téléphone et en y orientant les victimes de leur connaissance. Certaines villes peuvent développer des initiatives plus ambitieuses : la ville de Reims a par exemple financé des portables « secondaires » aux femmes venues porter plainte pour des violences conjugales. L’idée est de libérer la parole des victimes. Le maire est ainsi en capacité de mettre en mouvement l’action publique, il peut insuffler une dynamique, c’est valable aussi pour la mise en place de dispositifs tels que Voisins vigilants par exemple.